Perspectives

Mon expérience de traduction: le poids du genre dans la langue française

Écrit par:  Myriam Arès (elle).


Étant chargé de la traduction du site web de Sex[M]ed, je me suis retrouvé plus consciente que jamais de l’importance et du sens des mots que nous choisissons d’utiliser. En tant que femme francophone, cis et hétérosexuelle, j’étais consciente de certains de mes privilèges, mais j’ignorais encore de nombreuses façons dont la langue française, jouait un rôle dans la formation et la description des visions du monde, d’une façon qui à mon avis désavantage plusieurs personnes faisant partie de la communauté LGBTQIA2S+. Grâce à ce challenge, j’ai eu l’opportunité de vraiment me concentrer sur l’analyse des mots, leur genre et ce qu’ils peuvent signifier. 

J’ai commencé par m’instruire et par prendre quelques cours rapides sur l’écriture inclusive. Cependant, j’ai trouvé que les ateliers sur le sujet étaient peu nombreux et la plupart des informations semblaient dépassées, même à moi qui ne suis en aucun cas un expert en la matière. Mon processus a finalement été le suivant :

  1. J’ai choisi d’utiliser le moins de mots genrés possible, en me laissant un espace créatif pour échanger des mots genrés plus couramment utilisés pour d’autres non genrés (par exemple, personnel de la santé vs professionnel de la santé). 
  2. J’ai choisi d’utiliser iel. Iel, pour ceux qui ne sont pas familiers avec le mot, est utilisé comme pronom pour de la troisième personne du singulier pour désigner des personnes, à l’instar de “il” et “elle”, mais de façon moins genré. Et je tiens à souligner que je n’avais pas réalisé qu’ielle était la version la plus “féminine” du mot, que je trouve à la fois bonne pour permettre aux gens de choisir précisément leurs pronoms, mais aussi quelque peu restrictive, car il n’y a pas de pronom purement non-genré. Je tiens également à souligner la nécessité pour ces pronoms de devenir plus courants et pour les grandes organisations françaises (et dictionnaires) de reconnaître leur existence. 
  3. Je voulais également confirmer avec chaque membre de notre équipe ce qu’ils ressentaient avec la traduction de leur biographie, publié sur le site web. Grâce à mon processus de traduction, j’ai réalisé à quel point les mots dans une biographie peuvent être très personnels et je voulais m’assurer de respecter et d’honorer ceux de chacun. 

J’ai rapidement réalisé à quel point les mots français couramment utilisés sont genrés, en particulier dans le milieu de la santé. Je n’avais jamais vraiment compris à quel point cela pouvait avoir un impact, car chaque mot semble n’être qu’au féminin ou au masculin. “Un grand écart pour l’inclusivité”, ai-je pensé. Je souhaite que cela puisse être abordé, mais je vois aussi à quel point le genre est profondément enraciné dans le système de la langue française, ce qui peut rendre cette tâche difficile. Il est aussi important de considérer l’impact que le choix des mots peut avoir sur un patient, notamment pour le maintien d’une relation thérapeutique de confiance. Il ne s’agit pas ici de “s’accrocher dans les fleurs du tapis”, mais bien de respect. Respect pour la personne devant nous, respect pour ses pronoms et respect de ses expériences vécus, même si elles sont différentes des nôtres.  

Cet exercice a vraiment entraîné mon cerveau à voir l’impact des mots et du langage, et j’aimerais pouvoir contribuer à la compréhension d’autres personnes de la façon dont le français pourrait intrinsèquement entraver le processus en termes d’inclusivité et quelles étapes nous pouvons faire pour commencer reconnaissant cela. 

Examples des mots communs et leur équivalent non-genré:

  • professionnels/professionelles de la santé -> personnel de la santé ou prestataires de soins de santé 
  • les étudiants/étudiantes -> la cohorte étudiante ou des universitaires 
  • les patients/patientes -> la communauté concernée ou des personnes vivant avec un problème 
  • conjoint/conjointe -> partenaire sexuel ou partenaire de vie 
  • tous/toutes -> toustes ou membres de la communauté ou la collectivité en entier 
  • iel/ielle -> they/them for singular use (notice the nuances of masculine and feminine spelling differences) 
  • un ami/une amie -> un proche, un camarade 
  • les professeurs ou les professeures -> le corps professoral 
  • une femme ou un homme -> un adulte, une personne, un individu

Being tasked with the translation of the Sex[M]ed website, I found myself more aware than ever of the importance and meaning of the words we chose to use. As a native French speaker and cis, heterosexual woman, I was aware of many of my privileges, but I was still ignorant on many of the ways in which language, especially French, played in a role in shaping and describing world-views. Thanks to this challenge, I was given the opportunity to really focus on analyzing words, their gender, and what they can mean. 

I wanted to start with educating myself and decided to take a few quick classes on inclusive writing. However, I found that workshops on the subject were few and far between, and most of the information seemed outdated, even to me, who is in no way an expert on the matter. My process ended up being as follows:  

  1. I chose to use as few gendered words as possible, by allowing myself creative space to swap more commonly used gendered words for different non-gendered ones (for example, personnel de la santé vs professionnel de la santé). 
  2. I chose to use iel. For those who do not know, iel is the Frech equivalent of using a third person “they” in English. And I want to point out I had not realized ielle was the more “feminine” version of the word, which I find both good in terms of allowing people to choose precisely their pronouns, but also somehow restrictive, as there is no purely non-gendered pronoun. I also want to point out the need for these pronouns to become more mainstream, and for important French organisation (and dictionaries) to recognize their existence.  
  3. I also wanted to confirm with every member of our Team how they felt with the translation of their bios. Through my process of translation, I realized how very personal the words in one’s bio can be, and wanted to make sure to respect and honour everyone’s.  

I quickly realized how much of the commonly-used French word are gendered, especially in the clinical setting. I had never really understood how much of an impact this can have, as each words seems to be only in feminine or masculine forms. “A big gap in inclusivity”, I thought. I wish this could be addressed, but I also see how they are deeply engrained in a system of language based on gender, which may render this task difficult. It is also very important to consider the impact that the choice of words has on a patient, especially for building a therapeutic relationship based on trust. This is not about grasping at straws or being picky, but really about respect. Respect for the person in front of us, their pronouns, and their lived experiences, even if they are different from ours.  

This exercise has really trained my brain to see the impact of words and language, and I would love to be able to contribute to other people’s understanding of the way that French might inherently hinder process in terms of inclusivity and what steps we can do to start recognizing that.

Myriam (elle) est actuellement étudiante en médecine à l'Université de Sherbrooke et détient un diplôme de premier cycle en biologie avec mention d’honneur de l'Université McGill. Après avoir vécu aux États-Unis et au Mexique, elle s'est beaucoup intéressée à la santé sexuelle et reproductive, et à la façon dont elle est mise en œuvre dans différentes communautés. Ayant évolué dans le domaine médical en français, elle souhaite également étendre [M]édSex à la grande communauté francophone du Canada.

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